Le bruit du silence

Publié le par Pierre Sirère

Le bruit du silence

66 !!! c'est écrit, ça clignote, c'est rouge et menaçant, la tète du petit bonhomme est triste, en colère, je rentre en excès de vitesse dans mon ancien village en Macronie, je viens d'aller chercher mon dernier chameau, un Kangoo  à Carcassonne chez deux vieux garçons aux roulements de R magnifiquements magnifiques..

Sur la route du retour, je ne conduis pas, j'obéis, vitesse limitée,  lignes interdites,  directions interdites,  attention vent violent!!!, des promotions attractives en 4 par 3 tout les 100mt, mon cerveau africanisé résiste, à la radio un type connu et mort, un sportif ou acteur je sais pas, je zappe, il est aussi mort sur toutes les autres radios, une nouvelle Nike aux couleurs improbables en promotion chez Décath, un nouveau cheese sandwich chez "mes couilles Mickey", la boite grise, un flash, un vrai celui là, pas grave, je part demain direction le sud.... des ronds points, des files, des tètes tristes des gens pressés, Perpignan a changé, des tunnels, des rebords comme dans mes circuits de Matchbox quand j'étais petit, c'est clair qu'un jour ils ne toucheront plus le volant en Toubabie....Des sens uniques, partout,  tu ne croises plus personne, tu ne dis pas bonjour de la main, tu avances, à la vitesse qu'on t'a dit, en faisant attention aux obstacles qui interdisent le parking n'importe ou.

je rentres chez mes parents, maman regarde des types connus qui jouent au tennis à la télé, mon père lis le journal, il regarde si il y a des morts qu'il connait aujourd'hui, sans doute pour se prouver qu'il est encore vivant, je monte en ville prendre un muscat sec, la terrasse du France est pleine, pleine de jeunes, beaucoup de barbus, c'est la mode , ils parlent peu, sont plongés dans leurs écrans,  ils commentent ce qu'ils voient, le mort célèbre du jour fait le buzz.

J'écoute le ronronnement de mon moteur, pas de bruit suspect, tout roule, un bon 120km/h constant depuis ce matin, de longues lignes droites, quelques oueds merveilleux pour varier le plaisir, je suis au sud de Boujdour, en plein Sahara Occidental, plus de radio, de rares panneaux poncés par le sable, à droite l'océan à perte de vue, à gauche un spectacle minéral, des dunes, quelques petits arbres résistants, souvent du Paftan ou de l'acacias, un chameau, les autres ne doivent pas ètre loin, je croise deux barbus, ici aussi c'est à la mode, quelques cabanes de pécheurs, faites de bric et de broc à flan de falaise, des ombres parfois, on a croisé 12 voiture depuis le départ ce matin, ça me rappelle quand j'étais enfant avec mes parents, on comptait les 2CV.

Marie ma copilote est silencieuse, au début du voyage, c'est son premier, elle occupait fièrement l'espace sonore du véhicule, c'était pas la peine de mettre la radio, dans le nord du Maroc son rythme a baissé, elle a ralenti, et là ce matin, plus de son.

J'ai mis une fuite de Bach au violoncelle dans le poste, plus de radio FM depuis Layoune, on croise un mouton,  je pense à St éxupéry, le petit prince n'est pas loin, hier soir à Tarfaya je suis allé faire une visite au petit musée de l'Aéropostale, j'y ai croisé Corto Maltese,  ceci explique peut ètre cela.

Marie ne dit toujours rien, je la regarde, elle a une larme qui coule sur sa joue. 
 

 

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